[Mise à jour 2022 de la nouvelle édition corrigée et améliorée disponible sur Amazon]
Intrigué par le résumé des Enfants de Vénus, mais vous hésitez encore à plonger dans cet univers?
Voici pour vous le premier chapitre du tome 1, afin de vous faire une idée du contenu ;)
Bonne lecture!
1.
En 379 avant V.R., l’hémisphère Nord accepta d’ouvrir ses portes aux réfugiés climatiques, après les centaines de milliers de morts causées par la montée des eaux dans les pays submergés. Cette même année fut élue la première présidente de l’Ordre Mondial, un gouvernement planétaire créé pour répondre au désastre écologique… … En 114 avant V.R., la signature du Traité de paix intercontinental mit fin au conflit énergétique qui divisait la planète depuis plus de cinquante ans. Les dirigeantes du Sommet des six continents se dirent prêtes à entamer la construction d’une époque plus pure et plus juste… … Le dernier épisode majeur de la grande immersion se déroula entre 88 et 73 avant V.R., provoquant la plus grande extinction de masse du millénaire… … La Révolution de Vénus fut le point de départ d’une nouvelle ère pour l’humanité. Après son mythique discours, la plus célèbre des Amazones rassembla ses partisanes et mit en place le nouveau régime dans le but de reconstruire la civilisation… … La reine Camilia reprit la tête du royaume de Sàlissa en l’an 223, faisant ainsi prospérer la lignée de Vénus dans l’hémisphère Nord… Physalis referma le livre avec dépit et le remit à sa place dans la bibliothèque. Ce n’était pas ce qu’elle cherchait. Même si elle n’avait pas toujours été assidue à ses leçons d’histoire, elle connaissait par cœur ces passages-là. Elle parcourut du bout des doigts les couvertures des autres ouvrages avec un but bien précis en tête. À cette heure-ci, un calme serein régnait dans la salle des archives du palais. Malgré l’horaire matinal, la pièce baignait déjà dans une douce clarté qui se répandait depuis l’étroite fenêtre en hauteur sur les murs blancs et les étagères. Celles-ci regorgeaient de trésors, comme les archives historiques, mais aussi les traités scientifiques ou les manuels botaniques. Physalis s’approcha de la section juridique à la recherche d’un ouvrage qui pourrait répondre à ses interrogations. Après réflexion, elle sortit un livre imposant dont la couverture usagée était marquée du sceau du royaume : une fleur de lys incrustée dans un coquillage. Cette fois, elle sentit qu’elle se trouvait sur le bon chemin. Le Codex du royaume régissait les lois dans la cité depuis des décennies, il contenait forcément des réponses. Elle parcourut l’index et trouva aussitôt le chapitre qui l’intéressait. Les pages volèrent à toute allure entre ses doigts. Elle se pencha sur l’ouvrage et ses nombreuses lignes de texte microscopique avec une curiosité de plus en plus nerveuse.
Pour perpétuer la descendance du royaume, la princesse aînée devra enfanter au moins une héritière. La conception pourra commencer à partir de l’âge de vingt ans, et la méthode privilégiée sera celle de l’insémination. La conception avec procréateur ne sera cependant pas exclue. Le Codex se referma dans un bruit sourd qui résonna à travers la pièce. Physalis afficha un sourire conquérant. Elle savait qu’elle avait déjà lu cela quelque part ! Et désormais elle en avait la preuve. Soulagée, elle emporta l’ouvrage sous son bras et sortit à grands pas de la salle des archives, traversant avec la même allure déterminée le reste de la bibliothèque. En quittant ce lieu qui renfermait tant de savoir, elle eut soudain un sentiment d’ivresse. Elle songea à cette grande Histoire qui avait amené aujourd’hui le monde dans la paix. Le poids de ses responsabilités pesa sur sa poitrine. En tant que princesse de Sàlissa, elle serait elle aussi un jour dans ces livres d’histoire. Qu’aura-t-elle apporté à l’humanité ? Partagée entre ses pensées obsédantes et sa récente découverte, Physalis arpenta les couloirs déserts du palais vers sa prochaine destination, tenant fermement contre son cœur battant le fruit de ses recherches. Sa longue robe satinée de reflets violets ondoyait sans bruit sur ses chevilles à chacun de ses pas résolus. Depuis ses vingt ans, Physalis était tenue de donner une héritière au trône de Sàlissa, mais plusieurs mois passèrent sans qu’elle songe à cette responsabilité. Elle ne se sentait pas prête. Ni à être mère, ni à embrasser ses obligations de future dirigeante du royaume. Elle rêvait d’autre chose, d’une vie de voyages et de découvertes. D’une vie où elle serait libre de ses choix. Aujourd’hui, à sa façon, elle avait décidé de se rebeller. Elle s’arrêta devant la porte de la salle du conseil pour reprendre son souffle un instant. Tu n’as pas le choix, alors autant le faire à ta manière. Elle serra davantage le livre contre sa poitrine comme pour contenir son agitation. Tu dois t’affirmer. Tandis qu’elle s’encourageait intérieurement, un homme chargé d’un panier en osier s’engagea à l’autre bout du couloir immaculé. Vêtu de l’uniforme traditionnel beige et blanc des travailleurs du palais, le serviteur semblait pressé. En arrivant près de la princesse, il se courba avec respect et distance, selon le protocole, avant d’ouvrir la double porte qui menait à la salle du conseil. Physalis lui emboîta le pas, emportée par son élan. Une imposante table ronde se trouvait au milieu de la pièce. Comme dans le reste du palais, du sol au plafond, tout était d’un blanc pur. Des colonnes en marbre encadraient l’entrée ainsi que la longue baie vitrée qui donnait vue sur le nord de la cité, surplombant l’esplanade du palais et le désert au loin. Quelques compositions végétales décoraient sobrement chaque coin de la salle. La table en marbre où trônait le conseil de la cité et du royaume était équipée d’écrans tactiles, reliés au réseau informatique du palais. Une douzaine de sièges étaient prévus autour, mais seuls trois se trouvaient déjà occupés. Toujours en avance aux conseils, la reine Dianthe siégeait à sa place. Une tresse plaquée encadrait son visage intransigeant, se terminant en chignon serré sur sa nuque. Avec ses longs cheveux châtains et ses pupilles d’un bleu semblable à un ciel d’hiver, son port de tête toujours droit et ses tenues d’une sobriété somptueuse, la reine imposait sa prestance sans effort. Semblant absorbée par le document qui défilait sous ses yeux, elle leva à peine le regard à l’arrivée de sa fille. Elle était accompagnée par la conseillère Cyclamen, une femme de quarante-cinq ans à l’apparence douce et au caractère bienveillant. La conseillère Prunille était assise deux sièges plus loin. La doyenne du conseil paraissait souvent fatiguée lors des réunions matinales, mais son visage s’illumina soudain à la vue du panier que transportait le serviteur. — Déposez ça ici, indiqua Cyclamen en désignant la console près de l’entrée. Il s’exécuta, puis se courba avant de s’effacer de la salle sans un mot. Cyclamen se leva et adressa un sourire complice à Physalis. — Vous êtes drôlement à l’heure, princesse, dit-elle avec un regard intrigué pour le livre qu’elle tenait serré dans ses bras. — Oui, j’avais à faire tôt ce matin, répondit Physalis en essayant de garder un ton détaché. La reine leva soudain la tête. D’un air inflexible, elle examina la princesse de la tête aux pieds. Physalis réajusta les perles qui ornaient sa chevelure dorée, songeant qu’elle aurait dû prendre plus soin de sa coiffure ce matin-là. Mais sa mère finit par esquisser un léger sourire avant de replonger dans la lecture de son document. À moitié rassurée par cette réaction, Physalis gagna sa place autour de la table du conseil – le siège se trouvait juste en face de la reine – et déposa sans bruit l’ouvrage devant elle. Cyclamen ouvrit le panier en osier puis en sortit plusieurs corbeilles remplies de cerises, qu’elle prit soin de répartir devant les convives. À la vue des fruits, la conseillère Prunille entrouvrit la bouche avec envie. Leur couleur vermillon faisait saliver, d’autant plus que Physalis n’avait pas eu le temps de se nourrir depuis son réveil. Mais elle avait désormais l’estomac noué par le stress. Petit à petit, la salle se remplit, et bientôt toutes les conseillères se retrouvèrent autour de la table. Les femmes les plus influentes du royaume se réunissaient ainsi tous les mois. Certaines étaient les plus proches conseillères politiques de la reine, d’autres d’éminentes spécialistes dans leur domaine. Ce fut Artémisia, une grande femme aux cheveux sombres et courts, qui ouvrit la séance par un bilan concernant la reproduction d’espèces végétales éteintes. La scientifique se montra optimiste. Après de longs mois de recherche, son équipe semblait avoir trouvé le moyen de recréer une variété de fleurs dont le nom échappa à Physalis. Il s’agissait en effet d’une bonne nouvelle, mais la princesse avait l’esprit trop occupé à l’idée de devoir prendre la parole à son tour. Elle ne parvint pas à se concentrer un seul instant sur le conseil. Plus le temps passait, plus elle se demandait si elle n’allait pas se dégonfler. Les sujets s’enchaînèrent malgré tout et la fin du conseil approcha plus vite qu’elle ne l’aurait souhaité. La conseillère Liliacea, qui menait la réunion, demanda si quelqu’un avait quelque chose à ajouter avant de clore la séance. Physalis déglutit avec difficulté tout en se redressant sur son siège. — J’ai une nouvelle à annoncer. En dépit de son timbre de voix mal assuré, elle capta sans difficulté l’attention du conseil. Ces regards de femmes remplis d’assurance, tous braqués sur elle, avaient de quoi l’impressionner. Physalis se sentit comme une enfant sur le point d’avouer une bêtise, imaginant déjà les reproches qui suivraient. — Comme nous le savons, je suis en âge d’accomplir mon devoir de procréation, dit-elle en s’efforçant de maintenir une voix confiante et intelligible. En tant qu’héritière de ce royaume, je suis prête à considérer cette responsabilité comme une priorité à partir d’aujourd’hui. Une rumeur étonnée parcourut l’assemblée, accompagnée de quelques sourires bienveillants. — C’est une bonne nouvelle, répondit la reine sans manquer d’ajouter un ton amer à ses paroles. Elle n’appréciait sans doute pas que Physalis fasse cette annonce publiquement sans l’avoir consultée avant. D’autant que si la princesse avait subi des pressions ces derniers mois pour prendre en considération la procréation, Dianthe ne s’était pas montrée la plus insistante. — Cependant, poursuivit Physalis dans un élan de courage, comme j’en ai le choix, je souhaite accomplir ce devoir… Elle marqua une pause, esquivant l’expression déstabilisée de sa mère. — … à l’aide d’un procréateur. Plus un mot. Les conseillères s’échangèrent des regards aussi surpris que choqués. La reine se dressa sur son siège. — Comment ça, Physalis ? Tu sais très bien que l’insémination est la méthode habituelle, et c’est la plus sûre pour obtenir une héritière digne de ce royaume… — Je le sais bien, rétorqua Physalis avec toujours plus d’assurance. — En tant que princesse, tu dois suivre le protocole. Tu n’as pas le choix de la méthode. — Vraiment ? — Évidemment. Toutes les dirigeantes de Sàlissa proviennent de l’insémination, toi y compris. Physalis tournait déjà les lourdes pages de son livre. Elle s’arrêta et pointa du doigt l’article qu’elle avait révélé, avant de le lire à voix haute. — …la méthode privilégiée sera celle de l’insémination. La conception avec procréateur ne sera cependant pas exclue… Voilà ce que dit le Codex du royaume. Elle retourna l’ouvrage pour le montrer au conseil. Passée la confusion générale, les regards se tournèrent peu à peu vers la reine ; les conseillères n’oseraient pas se prononcer sur le sujet avant elle. Aucune émotion ne transparut sur le visage de Dianthe, mais son silence en disait long. — Ce Codex est totalement dépassé, n’est-ce pas ? demanda-t-elle à Liliacea sur un ton confiant. Cette dernière, conseillère chargée des lois et de la justice, cligna des yeux plusieurs fois avant d’arriver à formuler sa réponse. — Eh bien… Il aurait en effet besoin d’une mise à jour, Votre Majesté. Cependant, il est tout à fait légitime à l’heure actuelle. Liliacea sembla soudain horrifiée par cette précision. L’expression de la reine se crispa davantage, dans un effort de contenir sa contrariété. — Quoi qu’il en soit, je ne suis pas d’accord. Il n’est pas question de s’étendre plus longtemps sur ce débat. Cyclamen s’avança un peu sur son siège, captant le regard fermé de Dianthe. — Je suis aussi surprise que vous par ce choix, Votre Majesté, mais il me semble que la décision incombe totalement à notre princesse. Quelques hochements de tête conciliants vinrent appuyer ses propos. La reine dévisagea l’assemblée avec un air désapprobateur. — Et alors ? Nous la laissons faire ? Que vont penser les femmes du royaume ? — Qu’elles pensent ce qu’elles veulent, intervint Physalis, décidément pleine d’audace. L’important est le résultat, non ? Je donnerai une héritière au trône, mais à ma façon. Dianthe ne put réfréner un soupir agacé. — Physalis, l’insémination… — L’insémination n’est pas infaillible. Elle ne garantit pas à 100% le sexe de l’enfant. Tu le sais bien. La remarque vint parachever l’expression vexée de la reine, tel un coup de grâce. Elle prit de longues secondes pour observer sa fille, droit dans les yeux, le regard chargé d’émotions complexes, et Physalis comprit qu’elle avait gagné pour cette fois. Avec tout le conseil témoin de cette annonce, la reine ne pouvait refuser. — Soit… Puisque c’est ce que tu souhaites. Physalis réprima un sourire de victoire. — Il faudra donc sélectionner avec soin les procréateurs potentiels, poursuivit la souveraine en reprenant de sa stature. Liliacea, pouvez-vous informer les maisons de procréation de cette recherche ? — Entendu. — Cyclamen, je vous charge à nouveau de veiller sur la princesse durant cette étape, et de l’éclairer comme il se doit dans ses choix. Les choix d’une héritière doivent rester dignes du royaume, dit-elle en appuyant sur la fin de sa phrase. La conseillère approuva d’un signe de tête puis lança un regard en coin à Physalis. Un air de confusion et de déception la traversa. Cyclamen était responsable de l’éducation de Physalis depuis toujours. Elle était sa conseillère personnelle, son instructrice, son mentor… Et au fil des années, elle était aussi devenue sa confidente. Elle connaissait les défauts de la princesse, elle savait que la jeune femme rêvait de liberté, mais la plupart du temps elle se montrait très compréhensive et lui laissait faire bien des choses que la reine n’aurait pas approuvées. Physalis savait bien que sa conseillère aurait cherché à la dissuader de se confronter ainsi à sa mère. Peut-être que Cyclamen n’aurait pas désapprouvé son choix, peut-être même qu’elle l’aurait aidée à élaborer une stratégie pour plaider sa cause auprès du conseil, mais Physalis n’avait pas réussi à se confier à sa plus proche amie. Cette responsabilité-là, celle de donner une héritière au trône, elle était malheureusement seule à devoir l’assumer. Après la déclaration inattendue de Physalis, Liliacea mit rapidement fin au conseil. Il y avait à faire pour préparer la procréation. L’événement allait bientôt être connu dans tout le royaume et la compétition des maisons de procréation pour obtenir les faveurs de la princesse ne manquerait pas d’agiter la cité de Sàlissa. La salle se vida petit à petit, avec un brin d’excitation dans les conversations des conseillères. La reine passa avec hâte devant Physalis, l’air un peu moins confiant que d’ordinaire. Elle ne lui adressa pas un signe, même lorsque la princesse se leva sur son passage, et elle quitta la salle sans un mot. Physalis allait reprendre son livre et s’éclipser à son tour, quand Cyclamen la coupa dans son élan. Elle se saisit du Codex d’un geste ferme, puis l’invita à la suivre. Une fois dans le couloir, elle prit Physalis à part puis secoua la tête d’un air mécontent. — Vous êtes devenue folle ? Pourquoi avoir défié Sa Majesté devant le conseil ? — Elle n’aurait jamais accepté de m’écouter sinon. — Oh, je ne dis pas que ce n’était pas une bonne stratégie, concéda Cyclamen, mais vous n’auriez pas pu me consulter avant ? — Je suis désolée. Je sais que ça paraît insensé. La conseillère fit rouler ses yeux d’impatience. Sa colère se transformait déjà en indulgence, se dissipant sous les explications de Physalis. — Un procréateur ? Que vous est-il passé par la tête ? Je sais bien que vous avez un fort esprit de contradiction… mais tout de même ! — Je suis désolée de t’avoir mis dans l’embarras. Physalis était sincère dans ses excuses. Si elle ne s’inquiétait déjà plus vraiment pour la réaction de la reine, elle avait à cœur de ne pas froisser sa conseillère. Son regard implorant se posa dans les yeux bruns de Cyclamen, cherchant à en dissiper la confusion et à y retrouver la douceur qui s’en dégageait habituellement. Celle-ci céda en poussant un soupir, incapable de rester fâchée plus longtemps. — Non, je sais bien que vous ne pensiez pas à mal… Si vous tenez à imposer ce choix, c’est qu’il doit y avoir une bonne raison. Physalis baissa un peu la voix pour se confier. — Je sais que certaines ne comprendront pas, mais procréer avec un homme… c’est ça qui me semble naturel. Après quelques secondes de silence dubitatif, Cyclamen finit par hausser les épaules. Ce n’était sans doute pas le meilleur lieu pour parler de ce sujet. — Bon. Je vais de ce pas ranger cette précieuse archive, dit-elle en tapant avec vigueur sur le livre, et je viendrai vous trouver plus tard pour régler les détails du protocole. — Merci. Avant de prendre congé, Cyclamen ajouta avec un léger sourire : — J’espère que nous aurons ensuite le loisir de discuter de vos opinions, en toute honnêteté cette fois. — Oui, je l’espère aussi. L’esprit et le cœur soulagés pour de bon, Physalis décida d’aller se promener dans la cité pour compléter cette matinée victorieuse. Elle disposait encore d’un peu de temps avant d’être assaillie de questions sur la procréation, elle pouvait donc s’éclipser une heure ou deux. Elle connaissait par cœur les chemins à emprunter pour rester discrète aux yeux des habitantes. Déjà elle se dérobait par l’une des portes de service du palais, échappant à la vigilance de la garde royale, et s’engageait dans une allée voisine. La cité de Sàlissa se situait dans l’hémisphère Nord aux abords de l’océan. Grâce à cette situation, le climat était plutôt tempéré, même si l’on n’y distinguait pas vraiment les saisons. La région abritait la grande cité royale, entourée de quelques villages modestes. D’autres provinces éloignées étaient rattachées à l’autorité du royaume, mais l’essentiel de la population vivait dans la baie de Sàlissa. Entourée par un immense désert protecteur, le seul moyen d’y accéder par la voie terrestre était le Train Blanc menant jusqu’à la province des Agoras. Malgré sa petite superficie, c’était l’un des royaumes les plus influents du monde, car il avait à sa tête la descendance de Vénus. La célèbre Amazone, celle-là même qui avait changé la face du monde. L’héritage de Vénus se perpétuait à travers Physalis, mais son ancêtre lui semblait pourtant terriblement lointaine. Partageaient-elles vraiment un quelconque point commun ? Alors qu’elle arpentait les rues les plus calmes de la cité, se laissant emporter par ses réflexions, Physalis ne croisa que quelques femmes sorties tôt pour profiter de la fraîcheur du matin. Un doux vent marin soufflait par intermittence. Elle aperçut aussi quelques hommes à travers les fenêtres des maisonnées, occupés à préparer le repas du midi. L’atmosphère était paisible, et Physalis aimait profiter de ce silence. Elle tourna au coin d’une petite rue pavée depuis laquelle elle pouvait déjà apercevoir l’océan. En s’approchant d’un coin de plage isolé, elle retira ses sandales et plongea ses pieds dans le sable chaud. Elle marcha un peu avant de s’asseoir face à l’étendue d’eau. Quelques petits flotteurs blancs, des engins de navigation à propulsion hydraulique, semblaient planer sur la baie, avançant à plusieurs centimètres au-dessus de l’eau sans souffrir du mouvement des vagues. Au loin, bien au-delà de ces engins modernes, un grand bateau en bois aux voiles blanches voguait sur l’horizon. Les pensées de Physalis se faisaient à présent plus claires. Si elle avait choisi la procréation naturelle, c’était bien parce qu’elle voulait être libre de son corps. Elle qui se sentait en permanence recluse dans ce palais, à qui l’on imposait des protocoles sans jamais lui demander son avis, elle souhaitait plus que jamais prendre le contrôle de sa vie. Puisqu’elle était obligée de donner une héritière au trône, elle pouvait bien décider de la manière ! Après tout, la plupart des femmes souhaitant enfanter procédaient ainsi. Pas dans la haute société pour qui l’acte charnel était inconvenant. Physalis avait bien eu vent de rumeurs sur certaines femmes du palais qui auraient recours aux services de procréateur, mais il ne s’agissait sans doute que de bruits de couloir. L’insémination coûtait cher, mais elle était rassurante car elle rendait le hasard génétique plus maîtrisable et, surtout, elle permettait d’éviter l’intimité avec un homme. Au fil de ses pensées, Physalis finit par se rendre compte que sa décision n’était pas sans conséquence. Elle ne craignait pas les hommes, elle ne les trouvait pas repoussants… mais elle ne les connaissait tout simplement pas. Elle n’était même pas tout à fait sûre de la bonne manière de procréer. À cette idée, ses joues s’échauffèrent. Elle devrait bientôt choisir un procréateur, mais en se basant sur quels critères ? La beauté ? La robustesse ? Son imagination s’affola. Pendant un court instant, elle regretta presque son choix, avant de se raviser. Non, elle était sûre d’elle. Sa conviction était profonde et renforcée par une intuition infaillible. Être intime avec un homme ne devait pas être si effrayant… Une brise légère souleva ses cheveux et un frisson la parcourut. La princesse se leva puis reprit la direction du palais, avant que son monologue intérieur ne lui provoque de nouvelles angoisses.
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